Tirana : la capitale overbunkée
J’ai passé quatre jours à Tirana, la capitale de l’Albanie.
Il fut un temps où c’était mal vu d’être mal vu en Albanie. Enver Hoxha avait embauché Joseph Staline en coach de vie et buvait du jus de communisme tous les matins au petit-déj’.
Depuis, la vie a bien changé à Tirana. J’ai découvert une capitale captivante, colorée et très plaisante à visiter. J’atteins ici le climax des compliments que je puisse adresser à une ville. C’est un indice sur mon appréciation générale de Tirana, à découvrir en fin d’article.
Les fans de bunkers, de communisme et d’écoutes téléphoniques apprécieront cet article. Pour les autres, j’essaye de vous convaincre d’aller à Tirana !
La place Skanderberg
Dans les années 90, les étudiants albanais ont déboulonné les statues de Lénine et Staline pour garder que les mecs bien. Ils sont comme ça ici. Si on n’aime pas ta tronche ou que tu fais trop de communisme, ta statue saute direct !
Au centre de la place Skanderberg, on peut voir un mec à cheval. Je me méfie, la dernière fois que j’ai vu un mec à cheval, c’était Alexandre le Grand à Skopje, mais il n’avait pas le droit de s’appeler comme ça. Alors, il s’appelait littéralement « un mec à cheval ». Mais là, non. Le type s’appelle Skanderberg. Il a repoussé l’Empire ottoman à l’époque où Charles VII « le Bien Servi » était roi de France. Vers 1430 et des pastèques. C’était quelqu’un de bien, Skanderberg.
Le reste de la place est occupé par une fresque, une mosquée, une église, et tout un tas de gens qui profitent de la vie.
Le mont Dajti
Pour prendre de la hauteur, un téléphérique part du Bunk’art 1 et va jusqu’au mont Dajti.
De là-haut, la vue sur la pollution est imprenable.
Un club de poney, un parcours de minigolf, un château gonflable et un parc d’accrobranche complètent le paysage. Il y a bien un trek à faire dans les parages, mais la boue, la flemme et des baskets en toile me convainquent de ne pas la faire. La visite se transforme en « une photo et puis s’en va. »
Tirana et son Blloku
Blloku, c’est un peu The place to be à Tirana. Les restos et les bars branchés se succèdent pour le plus grand bonheur des Tiranais. Ils en profitent maintenant. Car, quand c’était tonton Enver qui avait les clés de la boutique, c’était différent.
Il fallait avoir ton nom dans la Nomenklatura si tu voulais t’adonner à des choses sympas de la vie, comme boire un coup ou pratiquer l’humour en milieu pacifique. Aujourd’hui, le quartier est vivant, coloré et… accessible à tous !
L’histoire de Tirana
Passons au cours d’histoire sur la ville, et un peu sur le pays aussi. Car avant d’être une verte contrée où les sourires et le raki coulent à flots, l’Albanie était en noir et blanc. Et tout le monde surveillait son voisin pour le balancer s’il regardait une autre chaîne que TF1 ou s’il se couchait à 21 h 02.
Les murs de La Maison des Feuilles ont des oreilles
Construite en 1931, « The House of Leaves » était à l’origine une maternité. Mais en 1945, elle donne naissance à un monstre aux oreilles si grandes qu’il peut écouter jusqu’aux frontières du pays. Le musée relate quarante ans de surveillance et de paranoïa au sein d’un pays qui s’est peu à peu refermé sur lui-même en se mettant ses alliés à dos. À tel point qu’Enver Hoxha (ouais, encore lui) fera installer 175 000 bunkers, encore visibles aujourd’hui, pour surveiller la moindre parcelle de terre albanaise.
À l’époque, la Sigurimi, le service des renseignements d’Enver, met le pays entier sur écoute. On recrute des hôtes. Ces derniers hébergent les agents censés surveiller les taupes qui rapportent les murmures du peuple. Tout le monde est un ennemi potentiel et les étrangers en particulier.
Abonné à Parano Magazine, Enver fait même recruter d’autres agents pour surveiller les agents de surveillance. Et quand y’a un doute, y’a pas de doute. Alors, on fusille les agents au moindre soupçon. Fallait pas te tromper de voisin quand t’avais plus d’œufs à la maison, à l’époque !
Les bunkers géants
Quand ton métier, c’est dictateur, il arrive parfois que ton peuple ne soit pas tout à fait heureux. En prévision du moment où il aurait envie de le faire savoir, Enver Hoxha a fait construire deux bunkers géants. En plus du processus de bunkerisation du pays dont je parle plus haut.
Bunk’art 1
Construit dans le plus grand secret entre 1972 et 1978, le Bunk’art 1 s’étend sur 3 000 m² en dehors de la ville. Il comporte 106 pièces sur 5 niveaux, dont le plus profond et situé à 100 m sous la montagne. Tout fut aménagé pour accueillir Enver, ses généraux et leurs familles le jour où ils auraient envie, ou besoin, ou les deux, de disparaître.
Tout ce beau monde casse sa pipe avant de pouvoir jouir de ce joli pied sous terre. Enver Hoxha montrera l’exemple en mourant d’une crise cardiaque en 1985.
Comme le Bunk’art 2, le Bunk’art 1 est aujourd’hui un musée. Les dernières salles servent de moyen d’expression aux artistes du pays et aux associations albanaises.
Bunk’art 2
Le Bunk’art 2 part du centre-ville et s’étale sur des centaines de mètres sous la place Skanderberg. Les nombreuses pièces nous apprennent l’histoire du pays et comment la police, devenue milice, a fait régner la terreur à ses habitants pendant des décennies.
Tirana : la capitale overbunkée !
Ce n’est pas souvent, alors on va en profiter pour le dire. J’ai bien apprécié la capitale albanaise. Si les cours d’histoire font froid dans le dos, ses quartiers aérés et son street art omniprésent sur le thème de la joie de vivre la rendent très plaisante à visiter.
En plus du mont Dajti, plusieurs parcs et espaces verts permettent à Tirana et ses habitants de respirer à pleins poumons. La ville a les atouts historiques et épicuriens pour te convaincre de venir. Que ce soit pour une semaine ou un week-end.
Marche sur mes pas !
1 € = 106,22 Leks albanais (ALL)
Dormir à Tirana
- Hostel Oakland : 1 225 ALL (11,40 €) par nuit la chambre simple avec salle de bain commune. Dépanne bien pour une ou deux nuits, mais pas terrible.
- Central Park Rooms : 4 100 ALL (38 €) par nuit le studio. Très propre et idéalement situé près du centre-ville avec notamment une vue sur la place Skanderberg depuis la chambre et le rooftop.
Manger à Tirana
- Tymi King Pils : cuisine albanaise, pas trop mal.
- Oda Garden : cuisine traditionnelle et délicieuse à prix correct. Situé tout près du grand bazaar, le cadre est superbe.
- Mix pizza : bonne pizzéria située près du Bunk’art 1.
- Piceri Era : restaurant italien situé à blloku, à tester.
- Colonial bar : boire un bon cocktail à Blloku.
Les visites
- Bunk’art 1 & 2 : 600 ALL/p. et par bunker (5,50 €) l’entrée ou 800 ALL (7,40 €) pour les deux (ticket valable 72 h). Le Bunk’art 1 est ouvert de 9 h 30 à 18 h du lundi au jeudi, puis de 9 h 30 à 18 h du vendredi au dimanche. Le Bunk’art 2 est ouvert de 9 h 30 à 18 h du lundi au jeudi. Puis, de 9 h 30 à 20 h du vendredi au dimanche.
- La Maison des Feuilles : 700 ALL/p. (6,50 €) l’entrée. Ouverte tous les jours de 9 h à 19 h.
- Téléphérique du mont Dajti : 1 200 ALL/p. (11,10 €) L’aller-retour. Ouvert tous les jours de 9 h à 18 h.
Les transports
- Bus vers l’aéroport : 400 ALL (3,75 €) le trajet/p., 30 minutes. Un départ par heure, tous les jours de six heures à minuit, derrière le palais de l’opéra (Situé près de la place Skanderberg). Un départ par heure de 7 heures à 2 heures du matin tous les jours depuis l’aéroport de Tirana.
- Les transports en commun : 40 ALL (0,37 €) le ticket de bus. Les bus 81 et 88 permettent de se rendre au centre-ville depuis la gare routière principale. L’arrêt se situe en face de l’entrée de la gare, de l’autre côté de la route.
- Bunk’art 1 et téléphérique du mont Dajti : ils se situent à 400 m l’un de l’autre, l’arrêt de bus se trouve en face de celui des bus qui vont à l’aéroport (voir plus haut). Départ toutes les 10 minutes en direction de Porcelani (L11), prix d’un ticket normal. Il faut descendre au terminus Thesari, puis prendre le même bus dans l’autre sens et descendre à Teleferiku, deux arrêts plus loin (arrêt de bus Bunk’art 1 sur Maps.me).
- Bus Berat – Tirana : 500 ALL (4,65 €) le trajet/p., 2 heures. Chaque jour, un départ par heure depuis la gare routière de Berat.
Faire une lessive à Tirana
- Laj Thaj 2 : laverie automatique située ici, près du centre. Un lavage de 40/50 minutes en machine coûte 250 ALL (2,30 €) et le sachet de détergent coûte 50 ALL (0,46 €). Pour le séchage, c’est 100 ALL (0,92 €) les 20 minutes, mais je conseille 30 ou 40 minutes pour un séchage complet, respectivement à 150 et 200 ALL (1,40 € & 1,85 €).
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